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Santé mentale chez les personnes racisées en entreprise: enjeux et perspectives

Crédit photo: Jeffery Erhunse via Unsplash

[Note: Nous avons utilisé le terme de «personne racisée» dans le titre de l’article, mais nous recommandons plutôt l’utilisation de «personne BIPOC». Voilà pourquoi.]

Nous savons déjà que nous ne sommes pas toutes et tous égaux face à la gestion de notre santé mentale. Or, saviez-vous que les populations racialisées ont plus de chances de souffrir d’enjeux de santé mentale que le reste de la population?

Ces dernières années, le nombre de personnes en situation de détresse psychologique n’a cessé d’augmenter. La crise sanitaire a particulièrement affectée les populations les plus fragiles. On parle ici des personnes racialisées, en situation de handicap, en difficulté financière et autres. Résultat? Une relance du débat autour de la gestion de la santé mentale. Cette question se pose également au sein du monde du travail avec des chiffres de plus en plus alarmants. Comment aborder la santé mentale en entreprise? Quel est le rôle de l’employeur? Quels sont les défis? Quelles sont les solutions pour pallier ce fléau? Décryptage.

La santé mentale en faits et en chiffres

Selon la Chambre de commerce de Montréal métropolitain, environ 22% des employé·es vivent de l’épuisement professionnel. Un chiffre en constante augmentation notamment depuis la pandémie. Ces observations sont la conséquence d’un taux d’absentéisme en nette augmentation. En effet, plus de la moitié des absences de longue durée sont liées directement à la santé mentale. Paradoxalement, nous sommes face à une incohérence. La majorité des employeurs au Québec est préparée pour soutenir les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale. Or, comme l’explique Estelle Morin, psychologue du travail et professeure à HEC Montréal, les employé·es, de leur côté, estiment ne pas être suffisamment accompagnés dans la gestion de leur santé mentale par leur employeur notamment par le manque d’accommodements (télétravail ou travail en mode hybride).

Cet épuisement professionnel peut être lié à plusieurs facteurs: les horaires de travail, les conditions de travail parfois dangereuses, une charge de travail et un rythme excessif, la violence, le harcèlement, l’intimidation ou encore la discrimination et l’exclusion comme le souligne l’Organisation mondiale de la Santé (OMS). Également, la façon dont se sent l’employeur, lui-même impact l’environnement de travail. Plus les employeurs sont épanouis (notamment par le biais d’une bonne gestion de l’entreprise), plus l’impact est positif. «Pour près de 70% des travailleurs et travailleuses, leur patron immédiat a plus d’impact positif sur leur santé mentale que leur médecin (51%) ou leur thérapeute (41%) – il est même égal à celui de leur partenaire de vie (69%)». Dans le cas contraire, les effets sont néfastes à la fois pour l’employeur mais aussi pour l’employé·e.

Les employé‧es racialisées sont particulièrement affecté‧es par les enjeux de santé mentale

Au regard des dernières observations, la population racialisée et notamment la population noire se trouve particulièrement affectée. Elle a  6 fois plus de chances de souffrir d’enjeux de santé mentale que le reste de la population. Cela entraine de la «dépression, l’anxiété, des troubles de l’alimentation, ou encore l’addiction de substances».

Pourquoi les populations racialisées semblent plus affectées?

Le racisme au coeur de la problématique

Les raisons sont nombreuses et importantes à comprendre, comme le souligne l’Agence de la santé publique du Canada dans un rapport publié en 2022.

Tout d’abord, le racisme reste la pierre angulaire dans les explications de cette situation. En effet, dans notre société nord-américaine majoritairement blanche (et l’on pourrait même dire mondiale), le racisme est malheureusement bel et bien présent. Être victime de racisme provoque «un stress traumatique lié à la race» (race-based traumatic stress, en anglais). Ça a un impact sur la santé mentale (stress, anxiété, dépression) et physique (développement de maladies cardio-vasculaires, hypertensions, diabète, etc)..

Le racisme se manifeste notamment par des micro-agressions. Il s’agit de racisme au quotidien véhiculé par des remarques humiliantes à l’attention des personnes racialisées. Elle peuvent être exprimées de façon consciente ou inconsciente. Ces micro-agressions peuvent s’illustrer de plusieurs manières: cela peut être des remarques verbales ou non verbales, de l’insensibilité, de l’invisibilisation ou encore l’invalidation de la réalité des personnes racialisées.

Dans l’entreprise, le racisme peut prendre différentes formes. Voici quelques exemples.

  • la perception (de la part de l’employeur) que l’employé·e racialisée possède moins de qualification que ses collègues blanc·hes comme une remise en cause fréquente des compétences de l’employé·e racialisée ou encore un contrôle plus fréquent des performances par rapport aux collègues non-racialisé‧es,
  • par l’exclusion dans certaines activités de réseautage ou encore la rétention de certaines informations permettant d’agrandir son réseautage ou de permettre une évolution de carrière,
  • des microagressions comme des blagues douteuses à caractère sexuel, des commentaires sur l’accent ou des rappels constants sur les origines de la personne racialisée;
  • la discrimination capillaire notamment pour les femmes noires avec l’interdiction de porter des tresses, afros au sein de l’entreprise car cela ne reflète pas une image dite «professionnelle».

La santé mentale, un tabou pour plusieurs communautés

De plus, la santé mentale est un tabou au sein des communautés racialisées (croyances, stéréotypes, etc).

On ne perçoit pas la santé mentale de la même façon dépendamment de qui nous sommes et de notre vécu.

La pandémie a permis de libérer la parole et a contribué à démystifier la santé mentale pour beaucoup de personnes. Cela reste toutefois un sujet difficile pour beaucoup d’autres. Dû à des raisons complexes et multiples ancrées dans le colonialisme, les personnes racialisées vivent de la stigmatisation par rapport à la santé mentale.

Enfin, dans l’accès aux services de la santé, le manque de représentativité au sein du personnel de la santé (manque de diversité et d’inclusion), contribue au sentiment d’être seul·e face à un groupe ethnoculturel majoritaire, différent et ne comprenant pas les réalités vécues par les personnes racialisées. Imaginons une personne Noire queer qui souhaiterait être accompagnée par un ou une psychologue comprenant les enjeux vécus. Il est fort à parier que cette professionnelle de la santé sera diffcile à trouver. La représentativité est importante, surtout dans une démarche de bien-être.

Mais face à ces défis, il existe des solutions pour pallier cette réalité et permettre un meilleur accompagnement des personnes racialisées. Un leadership plus inclusif et l’existence de startups semble répondre aux problématiques liées à la gestion de la santé mentale des employé·es et notamment issu·es des communautés racialisées. On vous en parle dans le prochain article.

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Article rédigé par Michelle Martineau, collaboratrice externe spécialisée en question EDI

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