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Les femmes n’ont pas besoin d’être sauvées

femme et homme

Article initialement publié en 2017

Les femmes ne sont pas fragiles et n’ont pas besoin d’être sauvées. Messieurs, si vous voulez aider, ce n’est pas ce qu’il faut faire.

Le sexisme bienveillant se définit comme une idéalisation des rôles traditionnels des femmes et des hommes et l’expression a été mise de l’avant par les psychologues Glick, P., & Fiske, S. T. en 1996. Ils ont observé que les femmes sont pensées naturellement plus gentilles, proches de leurs émotions et compatissantes. Tandis que les hommes sont pensés naturellement rationnels, moins émotifs et plus forts, mentalement et physiquement. Ramené au milieu du travail, le sexisme bienveillant est derrière l’hypothèse, par exemple, que les femmes sont naturellement de meilleures assistantes administratives, parce qu’elles sont juste «meilleures».

Le sexisme bienveillant est une forme de sexisme qui peut sembler moins grave que le sexisme dit traditionnel, mais dont l’impact ne reste pas moins important. Il est souvent motivé par de bonnes intentions, mais il est tout aussi néfaste car plus difficile à percevoir. Ces hommes qui veulent aider les femmes, sous-entendent qu’elles ont besoin d’aide et sont donc en détresse.

La Gazette des Femmes, le magazine du Conseil du statut de la femme, a publié en 2016 une courte bande-dessinée explicative:
Exemple 1: «Mais je veux payer cette fois-ci!
Non non! C’est MA job.»
Exemple 2: «Peux-tu regarder-ça? J’ai besoin d’un avis féminin… Vous êtes tellement sensibles!»
Exemple 3: «Toutes les femmes ont un instinct maternel. C’est inné. C’est magnifique!»
Exemple 4: «J’adore les femmes. Elles sont tellement douces et fragilisées. Ça donne envie de les protéger.»

Voici une suite d’exemples tirés du milieu professionnel:
Jack Ma, le fondateur du géant chinois Alibaba a dit «Les hommes pensent davantage à eux-mêmes; les femmes pensent davantage aux autres. Les femmes pensent à prendre soin de leurs parents, de leurs enfants». Ça part probablement d’un bon sentiment, mais que ce se passe-t-il lorsqu’une femme n’est pas «aimante»? Est-ce qu’elle est une moins bonne leader? Est-ce qu’elle en est moins femme? De la même façon, on dit des hommes qu’ils sont des leaders naturels qui peuvent soutenir la pression. Si un homme n’aime pas la pression, est-il moins viril que son voisin?

On va confier des tâches d’organisation à une femme, car elle «fait ça tellement mieux que les hommes». Par exemple, c’est elle qui prendre les notes pendant une réunion, «elle écrit tellement plus vite et son écriture est toujours lisible». Pendant que les hommes, eux, seront occupés à discuter des vrais affaires et prendre des décisions. Être organisé est effectivement un talent spécifique, mais toutes les femmes ne le possèdent pas sous prétexte de leur genre.

Dans cet article du Harvard Business Review, l’auteur explique comment Anthony Scaramucci, alors nouveau directeur des communications de la Maison Blanche, décrit Sarah Huckabee Sanders, la nouvelle attachée de presse de la Maison Blanche. Il semble avoir la volonté de faire des compliments, mais pourtant leur effet est négatif. À un moment du discours, Scaramucci propose quelque chose à Sanders: «Sarah, si tu regardes, j’ai adoré la coiffure et le maquillage de vendredi. Continuons à utiliser les mêmes.» Évidemment, il est agréable d’être complimenté sur son physique, cependant, parler de l’apparence d’une femme dans un cadre professionnel, surtout lorsqu’on essaie de faire ressortir ses attributs professionnels, peut lui être préjudiciable.

Autre exemple, ce sera à une femme qu’on demandera de faire le test qualité final d’un site web. Grâce à ses compétences minutieuses, elle saura repérer les bogues et les erreurs. Oui, certes les femmes sont minutieuses. Mais les hommes également. Ces mêmes hommes, qui ont programmé ce même site web, ont eu besoin de minutie pour réaliser leur travail.

Selon un article du Guardian, lorsque les femmes travaillent en programmation, elles se retrouvent souvent à être des développeuses front-end et les hommes des développeurs back-end. [Note: Lorsque l’on parle de front-end, il s’agit de ce que l’on voit à l’écran et avec lequel on peut interagir: les couleurs, la position des éléments, l’affichage selon la taille de l’écran, etc. Le back-end couvre tout ce qui se passe en arrière, c’est un peu comme la partie immergée de l’iceberg: gestion de bases de données, une application, les serveurs, etc.] En schématisant, les femmes sont donc créatives et font en sorte que «les choses soient belles», tandis que les hommes travaillent à l’arrière-plan en «mettant les mains sous le capot». Généralement, celles/eux qui travaillent comme programmeuse/r back-end gagnent plus d’argent que les front-end. Selon mon expérience, cette répartition des rôles est souvent vraie.

Voici quelques pistes de solutions afin de ne pas faire de sexisme bienveillant:
Laissez les femmes agir, laissez-les prendre des risques, comme l’explique Yara El-Souedi, cofondatrice de l’Espace L, un club social pour femmes. «Si tu es un allié, il faut que tu saches quand laisser aller. Oui, c’est bien, tu nous appuies, mais appuie-nous dans les situations importantes. Laisse-nous parler, laisse-nous nous réunir entre nous. Le meilleur exemple que je puisse donner, c’est Black Lives Matter. En tant qu’alliée, je peux les soutenir dans leur combat, mais je ne peux pas dire que je comprends ou que je vis la même chose. Je n’ai pas à donner mon opinion non plus sur ce qu’ils devraient faire. S’ils ont besoin de moi, je vais être là pour les soutenir. C’est la même chose pour le féminisme.»

Si vous souhaitez complimenter une femme, essayez de le faire sur son intellect autant que son physique. Évidemment, ça fait plaisir de savoir qu’on est jolie, mais dans un contexte privé, pas professionnel. Le physique n’a rien à voir avec le fait de pouvoir mener tel projet à terme ou pas. Si vous êtes un patron et que vous présentez votre employée au client, vous ferez bien paraitre l’entreprise, si vous la présentez comme «intelligente et capable» et non pas «gentille et qui communique bien»

Et enfin mesdames, dites non lorsqu’on vous demande de faire quelque chose qui ne fait pas partie de vos tâches professionnelles. Vous savez dans quoi vous êtes bonnes et pourquoi vous avez été embauchées.

Les femmes ne sont pas les seules à subir le sexisme bienveillant. Il est dommageable pour les hommes également. Quand nous disons que les femmes sont plus sensibles, compatissantes, belles et intuitives, nous éloignons les hommes de leur capacité à la sensibilité, la douceur, la compassion et la beauté. Nous contribuons également aux stéréotypes selon lesquels les hommes sont mauvais dans les tâches ménagères, la communication et d’autres choses dites «féminines». Si les hommes admirent tant les qualités des femmes, ils devraient s’efforcer de les cultiver également. Également, les hommes qui les possèdent déjà ne devraient pas être montrés du doigt ou se sentir «moins mâle».

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